Fromage et desert
« Humm, extreme tourism ! », « Bad road, bad road » (traduction, si l’on prend en compte l’expression du visage : « N’y allez pas, la route est vilaine. Et а velo, mouarf mouarf, non mais on reve ! »). Bref, а la sortie du ferry, nous etions prevenus : la route des prochains jours n’allait pas etre aussi douce qu’une voie verte longeant le canal de Bourgogne…
Notre tampon du bureau de l’immigration en poche, nous avons reussi une deuxieme performance а Aktau : trouver la route qui file vers l’Est. Le Kazakh a toujours une direction а donner…il suffit simplement de cumuler les sources pour decouvrir la verite.
Bref, а peine sortis de la ville, nous comprenons une chose. Dame Nature, comme toutes les dames, a parfois envie d’intimite. Dans son boudoir, elle peut alors etre…elle, complиtement elle : sauvage, abandonnee. Et si elle est dans son boudoir, c’est bien qu’elle ne veut pas etre derangee, sauf si on demande la permission d’entrer, sous peine de se reveler taquine.
Je suis fan de ce panneau !
La route Aktau – Beyneu, c’est l’un des boudoirs de Dame Nature. Naivement, nous avons oublie de demander la permission d’entrer, pensant ne pas deranger. Taratata !! Du coup, Dame Nature, elle a et taquine. Ce qui devait etre une steppe s’est donc revele etre un dйsert. Le desert de Mangistau pour etre precis.
Les premiers jours, quand on roule dans le desert, il faut s’y faire : la temperature, meme en juin, peut depasser les 40°C, ce qui, pour les cyclos que nous sommes a deux consequences. Il faut trouver de l’eau, ce qui n’est pas toujours evident et il faut la transporter. Mais plus tu te charges, plus tu peines. Plus tu peines, plus tu transpires. Plus tu transpires, plus tu as besoin d’eau. Et lа, tu entres dans un cercle vicieux…Si en plus tu as envie de te laver (le desert, c’est poussiereux…Dame Nature ne passe pas souvent le plumeau), alors lа, tu dois te transformer en dromadaire pour transporter jusqu’а 10 litres d’eau.
Et la, il me dit « Alors, ca bosse fort depuis Istanbul ? » (desole)
Des dromadaires justement, tout comme des chameaux, nous en avons vu des dizaines. Quand ce genre de bete vient te voir sur ton campement, c’est lа que tu te dis que t’as dejа bien roule depuis Paris…Mais comme je le disais precedemment, Dame Nature est taquine. Elle a donc envoye egalement quelques gardes du corps pour verifier que nous ne voulions pas faire du grabuge. Le premier matin, nous avons donc decouvert un petit scorpion sous la tente. Pendant 3 jours, ca a ete notre lot quotidien…puis vendredi matin, au moment meme oщ on s’etonnait de ne pas en avoir vu, nous avons vu debarquer, а un metre de la tente, une grosse araignee velue, taille XXL. Vous avez dit « Tarentule » ?
Mais, rassurez-vous, Dame Nature est juste : quand elle a vu que nous n’etions pas des ingrats, elle nous a alors ouvert la porte de son boudoir, en grand. Si la progression sur la piste a ete usante pour les dos et les velos (une crevaison quotidienne notamment et un pneu qui ne demande qu’а rendre l’ame pour moi…), nous avons pu admirer une faune incroyable : chameaux et dromadaires donc, tortues de terre, marmottes, gerboises, rats des sables, serpents, gros lezards, faucons, phasmes (…). Chaque jour, nous avons egalement eu le droit a des panoramas incroyables, notamment sur les plateaux decoupes а angle droit du cote de Shetpe. Non, decidemment, le desert, ca n’est pas le vide !
Eloge de la lenteur : c’est en roulant doucement au’on voit le plus de petites betes curieuses !
Rencontres avec les Kazakhs pour le moment limitees principalement aux chauffeurs routiers, qui n’hesitent pas а lacher une bouteille d’eau quand ils voient deux cyclistes tout poussiereux galerer dans le sable et avec les restauratrices des gargottes de bord de route, qui ne semblent pas si etonnees que зa de nous voir debarquer (d’autres cyclos ont ouvert la piste avant nous !).
Hommage a un sponsor : Camille lache le velo pour le cheval…
Les restaurants de bord de route sont souvent tres chaleureux…
…et l’occasion de se faire de nouveaux fans (les plus attentifs auront remarques que le jeune homme porte fierement le badge de La Caravane : il a enfile un t-shirt juste pour pouvoir l’arborer !)
Nous nous posons 24 heures а Beyneu, pour prendre une douche, des forces et des provisions, et filons ensuite plein Sud, vers l’Ouzbekistan, ou l’on compte bien utiliser les 30 jours de notre visa а fond !
A tres vite,
Marc, dit « Bonhomme de sable »
PS : pour nos amis qui travaill(ai)ent chez un grand industriel specialise dans le fromage, allez dire au responsable commercial zone Asie centrale qu’on ne trouve pas de « Bovin-qui-se-gausse » dans les echoppes. Du coup, а notre grand regret, nous avons du nous rabattre sur une autre specialite fromagere, qui ne requiert pas de refrigerateur. Ca ne nous amuse pas. La preuve en image, juste pour vous.
Deux otages dans le desert. Bilan : des traces de bronzage collector et une alimentation honteuse.